Formation continue
Finance durable à Genève : enjeux, régulation et formation continue – Entretien avec Edouard Cuendet
À l’occasion de la 6ᵉ édition de Building Bridges à Genève, Édouard Cuendet, Directeur de la Fondation Genève Place Financière (FGPF), revient sur les grands enjeux de la finance durable. Entre régulation, opportunités d’investissement et rôle clé de la formation continue, il explique comment la place financière genevoise se positionne pour relever les défis d’un secteur en pleine transformation et renforcer ses compétences grâce à des programmes pratiques et pluridisciplinaires.
Edouard Cuendet, vous êtes Directeur de la Fondation Genève Place Financière (FGPF). La FGPF est membre fondateur de Building Bridges, dont la 6ème édition s’est tenue du 30 septembre au 2 octobre à Genève. Quels ont été les grands thèmes au cœur de cette nouvelle édition ?
Cette 6ème édition a mis en exergue les solutions innovantes ainsi que les opportunités et les risques d’investissement en finance durable. Durant trois jours, les nombreux participantes et participants issus de multiples horizons, tels que la finance, les organisations gouvernementales et non-gouvernementales ou encore le monde académique, ont eu la possibilité de dialoguer avec des experts et personnalités politiques. Le Conseiller fédéral Martin Pfister et l’ancien Secrétaire d’Etat américain John Kerry figuraient parmi les prestigieux orateurs du Sommet, qui a ouvert cet événement majeur dans le domaine de la durabilité.
Cette conférence a le mérite de faire bouger les lignes en faisant participer activement le public présent afin de trouver des solutions et contribuer à la mise en place d’actions concrètes. C’est dans cette optique que la FGPF a organisé conjointement avec l’Association suisse des banquiers (ASB) et l’Asset Management Association Switzerland (AMAS) un workshop interactif le 30 septembre sur la thématique du financement de la nature.
Quels sont aujourd’hui les principaux défis que rencontrent les institutions financières en matière de finance durable ?
J’aimerais tout d’abord souligner que la durabilité reste un enjeu important selon l’enquête conjoncturelle réalisée chaque année par la FGPF auprès des établissements bancaires, des gestionnaires de fortune et autres intermédiaires financiers.
Dans ce domaine, la réglementation joue un rôle déterminant. La Suisse mise sur l’autoréglementation qui appelle une coopération étroite entre toutes les parties prenantes. L’ASB et l’AMAS ont montré la voie, en codifiant des standards clairs sur l’intégration des critères ESG. Au printemps 2024, leurs directives ont été renforcées pour lutter plus efficacement contre l’écoblanchiment. Cette démarche pragmatique, construite sur la confiance et la collaboration, a été saluée par le Conseil fédéral. Ce dernier a en effet renoncé en l’état à l’élaboration d’une réglementation étatique.
Et les chiffres sont là pour attester de la pertinence de cette approche. Fin 2024, le volume des investissements liés à la durabilité s’élevait à 1’881 milliards de francs. 83% des acteurs du marché utilisent au moins trois stratégies d’investissement durable, avec une préférence pour celles axées sur les résultats, tels que les investissements durables thématiques.
D’ailleurs, pour atteindre la neutralité carbone en Suisse d’ici 2050, l’ASB et le Boston Consulting Group ont établi que les besoins en financement s’élèvent à 387,2 milliards de francs. Or, les établissements bancaires seront en mesure de financer 83% des investissements nécessaires à travers des crédits hypothécaires et aux entreprises. Le marché suisse des capitaux, les fonds étatiques, des financements mixtes et des partenariats publics-privés couvriront les 17% restant. Ceci démontre que le secteur financier est un levier puissant en faveur de la transition verte.
Le Certificat ISFB Finance Durable débutera prochainement (novembre 2025). En quoi ce programme apporte-t-il des solutions concrètes, et quelles sont, selon vous, les forces et spécificités qui en font toute la richesse et la qualité ?
Ce certificat répond aux besoins de la place financière genevoise de rester à la hauteur des enjeux et des attentes de la clientèle en matière de finance durable. Il apporte des solutions concrètes car il met à disposition une boîte à outils pluridisciplinaire – recherche, cadre légal, stratégies d’investissement et mesure d’impact – directement applicable dans la pratique professionnelle.
De manière générale, la force des programmes proposés par l’ISFB réside dans la richesse des échanges entre intervenants, praticiens de notre écosystème, et participants aux profils variés, qui donnent une dimension très opérationnelle et stimulante aux enseignements. Pouvoir compter sur ces formations de pointe à Genève constitue une véritable chance de renforcer notre compétitivité.
Pourquoi est-il essentiel, d’après vous, que les professionnels de la finance se forment en continu pour rester informés et à jour en matière de durabilité ?
Il est essentiel de rappeler que le savoir-faire constitue l’un des atouts majeurs de la place financière genevoise. La formation continue est ici un élément clé puisqu’elle joue un double rôle. Premièrement, elle contribue à mettre à jour les connaissances du personnel bancaire afin que son expertise réponde à l’évolution constante des exigences en matière de réglementation, de fintech et, bien sûr, de la durabilité. Deuxièmement, elle permet aux collaboratrices et aux collaborateurs d’être acteurs de leur évolution professionnelle, c’est-à-dire leur capacité à obtenir un nouvel emploi, à évoluer de façon autonome sur le marché du travail, à conserver un poste et à progresser dans leur carrière.

Edouard Cuendet
Directeur de la Fondation Genève Place Financière
« La durabilité reste un enjeu important selon l’enquête conjoncturelle réalisée chaque année par la FGPF auprès des établissements bancaires, des gestionnaires de fortune et autres intermédiaires financiers. »
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